María Victoria Casares Pérez est née le 21 novembre 1922 à La Corogne en Galice (Espagne). Ce fut un énorme bébé, non désiré mais accepté: "Quand mes parents m'ont eue, ce fut par distraction ou par maladresse…". On l'appelait “Mameluco” tant elle était potelée.
Son père, né en 1884 d'une famille de la bourgeoisie, était le seul survivant d'une fratrie, marquée par la maladie, de 9 garçons. Il s'appelait Santiago Casares Quiroga, Santi pour son épouse. C'était un personnage atypique, atteint de tuberculose depuis l'âge de 5 ans. Après des études de droit, jusqu'en 1931, cet avocat prenait plaisir à rédiger ses plaidoiries en vers ! Il était athée, républicain et francophile ! Maria le décrit comme un dandy élégant, provocateur, imprudent et timide en même temps. Il occupera l'important poste politique de ministre républicain. Pour cela, il sera obligé de s'exiler en Amérique du Sud et en Angleterre à l'issue de la guerre civile et à l'avènement de Franco. Il sera banni de son pays et rejoindra sa fille à Paris. Il tiendra un journal de bord concernant les amours et la vie de Maria, qui en fera état dans son livre.
Sa mère, Gloria Pérez, est dépeinte par sa fille comme fine et forte à la fois, d'une distinction rare, avec un port de reine et un sourire d'un prodigieux éclat : "Elle était, je crois, intelligente, artiste et meiga…(fée-sorcière)"
María a 23 ans à la mort de sa maman et 27 à la mort de son père. Elle portera ces deux chagrins sans jamais les surmonter. "Mes morts…" disait-elle…
Autre membre de la famille, sa demi-sœur aînée, Esther Casares, née d'une première union de son père. Elle aura également un frère adoptif, Enrique, jeune adolescent recueilli par sa mère lors de la guerre civile espagnole.
La petite María était appelée Vitola par son papa et Vitolina par tout le reste de la famille. Elle n'aimait pas, même à l'âge adulte, le prénom de María, prononcé à l'espagnole, à cause d'une comptine enfantine qui lui avait laissé un mauvais souvenir !
Elle grandit gentiment dans cette famille plutôt aisée dont elle garde un bon souvenir de la domesticité. Mais l'on décèle déjà chez cette petite fille un tempérament bien marqué : c'est une enfant sensible qui délivre les petites souris prises au piège, qui est attirée très tôt par la musique et la poésie (son père la réveillait avec l'ouverture du «Don Juan» de Mozart !). "Je déclamais dans leur intégralité des morceaux de bravoure à tue-tête, perchée sur un arbre du jardin, en sourdine et tremblante d'une étrange émotion à l'école ou devant mon père dans sa grande bibliothèque ".
Une enfant très imaginative, donc, qui s'invente un "petit pote démon", niché dans son oreille (elle s'en imaginera un deuxième plus tard), son petit Jiminy Cricket à elle !
Elle fréquente le collège de la Corogne.
En 1931, elle quitte sa Galice natale pour Madrid. Une nouvelle école, son premier rôle de théâtre, son premier bal, des épisodes qui compteront dans la vie de la future actrice, qui révèle déjà la personnalité de la passionata qu'elle sera plus tard : Une petite vierge ardente et Costume chinois.
Le 20 novembre 1936, chassée avec sa famille par la guerre civile qui éclate dans son pays, Maria débarque à Paris. Le surlendemain, elle fête ses 14 ans. C'est l'hôtel Paris-New-York devenu aujourd'hui une pizzeria de la rue Vaugirard qui sera leur première escale.
On inscrit Maria au lycée Victor-Duruy où elle va apprendre le français. La famille fait la connaissance par des amis communs d'un acteur célèbre à l'époque, D’Alcover, et de son épouse Colonna Romano
, sociétaire de la Comédie Française. D'origine espagnole, le couple va aider les exilés. Un jour, Maria déclame un poème devant eux ; elle tremble, elle pleure… une petite passionata toujours… Le couple est stupéfait: "Il faut qu'elle fasse du théâtre, il le faut ! sinon elle étouffera…". C'est le début de tout…,
Tout en continuant ses études, elle tente l'entrée au Conservatoire. Son fort accent lui joue des tours et elle est recalée. Alors, "Je m'y suis mise, je suis tombée à bras raccourcis sur cette belle langue qui m'échappait toujours".
C'est la guerre, nous sommes en 1939. Son père est obligé de s'enfuir en Angleterre. Le reste de la famille s'installe dans les Landes, en zone libre.
De retour à Paris, Maria habite avec sa mère dans un appartement niché au 6e étage d'un immeuble au coin de l'impasse de l'Enfant-Jésus et de la rue Vaugirard. Cet appartement au balcon en fer forgé, "…ouvert aux quatre coins du ciel", elle ne l'achètera jamais… "Il avait trop d'âme" (entendons-par là trop de souvenirs poignants : ses parents décèderont dans ce logement) pourtant pour elle ce fut un cocon, son havre pendant 30 années : "Alors, le pigeonnier, devenu port - nid - pays - foyer- patrie - terre haut située ouverte au ciel dans le cur même de la cité, semblait à jamais protégé".
Dès ce retour donc, elle veut tenter à nouveau l'entrée au Conservatoire. Elle fréquente le cours René Simon de la rue de Madrid. Mais elle échoue dans sa conquête de la 2ème partie du baccalauréat et le regrettera toujours. Le théâtre avant tout… Au concours d'entrée, elle présente deux scènes classiques, «Hermione» et«Ériphile» : reçue haut la main !
La voici élève de Béatrix Dussane. Elle fait des rencontres amicales comme celle d'Alice Sapritch… Elle n'a pas de très bonnes relations, par contre, avec Louis Jouvet
. Après la première année, où elle décroche un accessit, elle est convoquée à une audition au Théâtre des Mathurins, le fief de Marcel Herrand
et Jean Marchat
. Elle ne les appelle pas encore ses "… pères de théâtre…". Ils lui proposent un rôle dans «Deirdre des douleurs», une pièce irlandaise (1942)…
"Mon nom est Maria Casarès. Je suis née en novembre 1942 au Théâtre des Mathurins. J'ai été élevée sous la tutelle de Marcel Herrand et Jean Marchat
. Ma patrie est le théâtre. J'ai connu, en scène, plus de problèmes, de difficultés, d'incidents, d'accidents, d'échecs, de triomphes, de plaisirs, de joies, d'extases, d'événements que l'on ne pourrait accumuler dans la plus riche des existences…"
La carrière de cette magnifique tragédienne se situe dans la lignée des Rachel et des Sarah Bernhard.
Lancée par «Deirdre…», Maria a ensuite tout joué : des pièces classiques mais aussi des oeuvres audacieuses et inédites. N'oublions pas qu'elle osera interpréter, en 1967, «Les paravents» de Jean Genêt, oeuvre qui fera scandale et qu'André Malraux défendra contre vents et marées.
La Comédie Française (pour deux ans seulement), le TNP avec Jean Vilar qui l'embarquera dans son aventure du Festival d'Avignon, toutes les scènes parisiennes et les tournées en Province, le festival d'Angers. Oui Maria a fait tout cela… pour parler candidement !
Résumons cette prodigieuse carrière en nous permettant d'emprunter quelques photos à la très belle plaquette «Maria Casarès au théâtre», vendue à La Vergne, et qui présente 140 souvenirs en noir et blanc. Retrouvons- là avec ses partenaires et amis…
Maria préférera toujours le théâtre au cinéma: "Spectatrice pourtant passionnée et émerveillée devant les acteurs de cinéma qui ont su créer à travers leurs films des figures presque mythiques, peut-être parce que je porte en moi une autre forme de narcissisme, je n'ai jamais pu de l'autre côté de la caméra m'attacher à une telle quête".
Par ailleurs, elle avoue n'avoir jamais réussi à faire totalement abstraction de toute la logistique technique et à se passer de la présence du public. Cependant, fidèle à elle-même, elle aura choisi avec soin ses rôles à l'écran.
Attardons -nous sur ses principaux films !
Le chef-d'uvre du tandem Carné-Prévert n'est plus à présenter. Maria y est Nathalie, la fille d'un directeur de théâtre. Elle est unie au mime Baptiste Debureau (Jean-Louis Barrault). Mais ce dernier lui préférera Garance (immortalisée par la pétillante Arletty). Ce film mythique du réalisme poétique français est devenu une oeuvre culte. En 1990, 500 professionnels ont élu ce long métrage le plus grand film français de tous les temps.
Robert Bresson a eu l'idée de ce film en s'inspirant du «Jacques le fataliste» de Diderot. Il s'appuie sur les dialogues de Jean Cocteau. On remarquera particulièrement les éclairages très étudiés du visage de Maria, ravagée par la passion, et frustrée au point de manipuler ignoblement celui qu'elle aime. Jalousie, Vengeance, jouissance et souffrance, l'actrice les exprime de façon sublime. On dit que c'est à ce moment là que Cocteau l'a choisie pour son «Orphée».
Le roman de Stendhal est également interprété par Gérard Philippe, Renée Faure, Louis Salou et Lucien Coëdel. Maria y est une bien belle Sanseverina, fine et tragédienne.
Maria incarne La princesse de la mort qui entraîne Orphée-Jean Marais vers les ténèbres.
En voilà un film étrange… Chef d'oeuvre du surréalisme d'après-guerre, c'est du Cocteau “pur jus”… On y retrouve Maria avec sa voix légendaire, si envoûtante un peu rauque, et ses cheveux tirés. Elle forme, avec François Périer, un tandem original dans une sorte de tribunal de l'absurde, chargé de juger Orphée-Cocteau. Aujourd'hui, l'oeuvre peut paraître désuète… ou d'avant garde, selon ses goûts ! Pour ma part, je ne suis pas sûre d'avoir tout compris !
Il n'est pas question, bien sûr, de se faire ici l'écho de rumeurs non fondées. Nous nous tiendrons aux confidences de Maria sur le sujet…
Elle vivra une première amourette de jeunesse, un petit feu de paille, avec Enrique, le jeune espagnol recueilli par sa mère lors de la guerre civile. Mais l'histoire ne durera pas longtemps.
Avec son tempérament de feu, son regard si ardent, ses yeux verts obliques, on comprend aisément qu'elle ne laissait pas les hommes indifférents…
Ainsi, les deux hommes, qui vivaient en couple et dont les préférences allaient plutôt vers les messieurs, eurent tout de même chacun une passion intense et secrète pour la belle expatriée :
"Dès ma première rencontre avec lui, mon alliance avec Marcel Herrand fut scellée à vie. Et c'est que dans cet homme, un des plus renfermés, des plus secrets, des plus réservés que j'ai connus…se cachaient des qualités qui me le rendaient précieux et cher à jamais…"
"Jean Marchat, beau gosse, portant avec une adorable moue de démenti, l'air grave de dignité que donnent les responsabilités, était en réalité d'un charme infini…"
Le père du «Corbeau» succomba lui aussi à la belle Maria. Il fut question qu'elle soit son interprète, mais le jeune réalisateur eut la maladresse de lui offrir un bracelet… Elle crut qu'il l'avait choisie uniquement pour ses charmes et le projet capota. Ils se revirent toutefois plus tard avec beaucoup de plaisir.
"J'épiais chacun de vos gestes… Je captais la musique de chacune de vos intonations… et je pleurais d'une joie sans mélange…" (extraits d'une lettre par lui envoyée le 7 décembre 1943)
Maria éprouvera une grande fierté à rencontrer cette légende vivante du théâtre anglo-saxon. Quand elle fait sa connaissance, il a plus de 70 ans. Elle s'imagine une relation belle, théâtrale et… platonique ! Craig, lui, éprouvera une passion beaucoup plus tactile et virile… et Maria ne poursuivra pas : "Il était têtu et il m'inspirait un sentiment trop délicat pour qu'à mon tour je m'entête à jouer avec lui un vilain jeu…"
Marcel Herrand tend un livre à son amie: "Tiens… Je pense que tu peux jouer Martha. C'est d'un jeune auteur que j'aime. Lis…"
La pièce s'appelait «Le malentendu». Elle était signée Albert Camus. L'actrice assiste à la lecture de la pièce par l'auteur: ce sera le début d'un grand amour… une passion belle et dure… Albert Camus est mariée et père des petits jumeaux Jean et Catherine. Sa jeune épouse, Francine, est restée en Algérie. Le jeune auteur vit seul à Paris. Nous sommes en 1944. Les deux amoureux apprennent ensemble le Débarquement. Maria découvre le rôle de résistant de son amant, et sa collaboration au journal clandestin "Combat".
"Nous avons vécu de magnifiques heures durant l'année 1944 mais elles ont été longtemps traversées par l'orgueil de part et d'autre" (Camus).
Il se séparent à la fin de la guerre. Le 6 juin 1948, ils se retrouvent par hasard ; l'écrivain devenu mondialement connu se partagera entre son épouse rapatriée et la belle Espagnole. Ils ne se quitteront plus jusqu'à la mort d'Albert Camus, le 4 janvier 1960 dans un accident de voiture, sur une ligne droite entre Sens et Paris.
"C'était une histoire invulnérable que la leur, aussi éternelle que ces vagues et ces rivages où ils accostaient sans plus rien dire" (Frédéric Mittérand, «Destins d'étoiles : Albert Camus»).
Elle fait sa connaissance dans la loge de Marcel Herrand. Elle éprouve alors un véritable coup de foudre. S'en suivra une fougueuse liaison amoureuse sans qu'elle puisse lui donner le nom d'amour. Elle se fiancera tout de même à lui, envisageant un mariage qui n'aura jamais lieu.
"Il avait été très beau… mais je préférais sa beauté du moment qui nous a réunis, quand il portait déjà sur son visage les stigmates de sa peine à vivre. Je n'ai jamais connu ses belles mains que pour me guider, servir ou caresser."
Mais le comédien était d'un naturel jaloux. Lui et Maria s'entredéchireront et se sépareront bien mélancoliquement sur un constat d'échec… "Au delà de sa mort" (en 1976) ", je sens le fil à jamais vacant qui ne m'a reliée qu'à lui."
"À Rome" (lors du tournage de «La Chartreuse de Parme» en 1947)", j'avais retrouvé la silhouette filiforme, le profil nettement découpé, le sourire clair et ingénu, les grands yeux de ciel et le regard nostalgique de Gérard Philipe…"
Avec de très jolis mots et beaucoup de pudeur, Maria raconte le jour où ils ont enfreint les interdits qu'ils s'étaient silencieusement fixés, où ils ont laissé la part la plus rare de leur amitié… Chacun repartira vers son destin… Ils ne se verront plus pendant 10 ans, se croisant de loin.
Lors du tournage du «Testament d'Orphée», Jean Marais arrive sur le plateau pour lui annoncer le décès de Gérard. Elle a la vision imaginaire de sa longue et élégante silhouette lui montrant en souriant combien il est facile de franchir la porte de l'au-delà… De ce jour, elle, qui avait peur de la mort, se sentira rassurée…
"Voici mon mari. Le seul homme qui m'ait donné son nom après mon père, celui à qui je suis allée tout naturellement pour qu'il m'unisse à ma patrie nouvelle… "
Car elle finit par se marier, le 27 juin 1978. Il s'appelle André, elle le nomme "Dadé". Elle l'a rencontré au TNP, 23 ans auparavant dans la troupe de Jean Vilar où il était l'homme de tous les métiers, se rendant ainsi indispensable. À ce titre, il sera dans l'aventure du festival d'Avignon. Interprète de chansons, il écrira, en 1959, la chanson «Souvenance» pour une grande dame brune, Barbara.
André était père de 5 enfants d'unions différentes, et grand-père quatre fois ! Toute cette petite tribu viendra régulièrement à La Vergne.
Il était une fois une belle Espagnole, expatriée à cause de la guerre, qui cherchait pour elle et son compagnon, un havre de paix, un refuge, un coin secret, et qui en un moment décida de choisir cette gentilhommière reposante et rassurante. Cette maison couverte de lierre s'est bâtie au cours des siècles. Entourée de deux hectares et demi de prés, elle est là, immuable comme pour garder la mémoire de ceux qui y ont vécu.
"Nous avons pris l'allée qui conduit à la Vergne…Iil était inutile d'aller plus loin…le chemin creux…eut suffi, je crois, à nous retenir…"
La Vergne, "Je la passe sous silence… Je la cache… C'est le trou où je m'isole, le cocon où je me refais. Même mes amis les plus intimes, c'est à Paris que je les reçois…". La Vergne, "… loin de la ville…hors du bûcher théâtral, à la fraîcheur de la Charente…".
Maria et son compagnon mettront des années à s'installer à La Vergne. André s'attellera à transformer la vieille maison en refuge confortable… Maria elle-même s'adonnera au ménage, "… une des meilleures écoles !".
À Paris, ils s'amuseront tous les deux à chiner dans les brocantes, chez les antiquaires pour dénicher les objets, transportés dans une vieille 2 CV, qui habilleront la nouvelle demeure. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, Maria n'avait pas des cachets pharamineux comme ceux que touchent les grandes stars actuelles. Tout son argent passait dans l'aménagement de La Vergne. Et l'on sait que c'est la pièce «Cher menteur», avec Pierre Brasseur, qui lui aura permis d'acquérir son refuge campagnard.
C'est là qu'elle envisagera régulièrement ses courtes vacances, c'est l'asile qu'elle choisira pour la rédaction de son livre dont sont extraites les citations du présent dossier. «Résidente privilégiée» constitue une biographie particulièrement touchante et bien écrite, sincère et passionnée. La Vergne y est présente du début à la fin. Trois saisons seront nécessaires pour mettre un point final (le 30 septembre 1979) à ce livre de souvenirs qui sera publié en 1980.
La Vergne accueillera le couple de plus en plus fréquemment. André Schlesser s'y s'éteindra en 1985. Sa dépouille fut inhumée à Alloue. Maria décèdera le 22 novembre 1996 dans sa chambre de la grande maison protectrice et rejoindra son mari. Ils reposent côte à côte, tout en haut du petit cimetière que l'on aperçoit de La Vergne, à travers les feuillages. Leurs pierres tombales jumelles sont réunies à jamais par un joli rosier.
"Et là-bas, à la lisière des terres charentaises, au bord du courant qui allait rejoindre l'Océan, un nouveau Mesias… et que j'ai nommé l'Archange, gardait pour moi les lieux où je voulais renaître."
La belle dame au tempérament de feu s'en est allée mais elle laisse son empreinte dans ce coin de terre charentaise. Sans jamais avoir renié sa patrie, l'Espagne, elle était très attachée à la France.
Madame Maria Casarès était Chevalier de la Légion d'Honneur, Commandeur des Arts et lettres, Molière 1989 pour son rôle dans «Hécube» d'Euripide. Elle fut pressentie pour l'obtention du César du meilleur second rôle grâce à sa performance dans «La Lectrice».
Sources : documents personnels, plusieurs images glanées çà et là, dans divers ouvrages ou sur la toile, au cours de nombreuses années de vagabondage, et dont je n'ai pas toujours gardé trace de l'origine.
J'adresse un grand merci à Aurélie, de l'équipe de La Maison du Comédien - Maria Casarès, pour son accueil à La Vergne et pour sa précieuse collaboration. Un grand merci aussi à mes deux photographes particuliers, Cédric Lebailly de Saint-Pierre-et-Miquelon et Yvette Jayet d'Échirolles.
Les citations présentées dans cette page sont extraites du livre de Maria Casarès, «Résidente privilégiée» (Donatienne)
C'était l'époque de Mardi Gras à Madrid. Celle qui n'est encore que la petite Vitolina a 11 ans.
C'est bien sûr aussi l'occasion de se déguiser et chaque maman rivalise d'imagination et de créativité pour composer pour son enfant le plus réussi des costumes. Gloria, partant des yeux obliques de sa fille, choisit un costume de Chinoise. Elle veut en faire la reine de Mardi Gras…
"Par je ne sais quelle exigence qui collait à ma peau, ce n'était pas une parure, ni un costume, ni un déguisement que je portais durant ces belles journées, mais un personnage… Cette petite princesse asiatique que maman voulait reproduire… Au lieu de lâcher mes forces vives dans le tohu-bohu général, muette, les yeux baissés, je passais au milieu de la fête, victime et officiante d'un autre rituel que je ne savais pas encore nommer". |
Pour respecter la tradition, on trouve des chaussures qui portent un talon carré juste au milieu de la semelle, sous la voûte plantaire ! très difficile à porter même pour une petite fille qui a soif d'authenticité…
Finalement, après des essais fatigants, on décide de remplacer le talon au milieu par deux talons un en avant et un en arrière !
"J'ai pu ainsi profiter d'une manière moins raffinée mais aussi moins douloureuse des journées qui me restaient et cela ne m'empêcha pas d'être élue la reine du bal costumé mais dans la fatigue, un étrange sentiment d'échec me revint à l'idée de ne pas avoir tenu jusqu'au bout sur les talons du milieu et j'ai pensé avec colère (oui une colère que je retrouve encore) que je ne devais mon prix qu'à mon nom." |
Quel regard intense, une petite vierge ardente comme l'appellera plus tard son professeur René Simon. Une vraie Meiga (fée-sorcière)! Le premier rôle tragique de la petite Vitolina. Elle n'a que 10 ans…
Ce magnifique portrait couvre tout un mur d'une des pièces du rez-de-chaussée de la Vergne à Alloue. Il figure aussi dans le livre de Maria. J'ai personnellement été captée par le magnétisme de ce regard de petite fille. Un grand merci à Aurélie de l'équipe de "La Maison du Comédien Maria Casarès" de nous l'avoir "prêté" pour qu'il reste dans les archives de L'Encinémathèque.
L'histoire de ce premier rôle, Maria Casarès l'évoque dans son livre de souvenirs, "Résidente Privilégiée". Il s'agissait d'une pièce de Jacinto Benavente, jouée à l'école à Madrid, et intitulée "Le Prince qui a tout appris dans les livres". Le personnage était une petite vieille, fée ou sorcière, une Meiga, qui prodiguait ses conseils au jeune prince qui après avoir tout appris dans les livres, se lançait de par le monde.
"Je serais curieuse de relire cette œuvre…Tout ce qui m'est resté…c'est cette inconnue, moi, qui à travers mes propres oripeaux et cette canne que j'avais souhaitée pour me tenir lieu d'appui ou de baguette magique, cherchais la voix, le port, la démarche, le comportement d'une vieillarde centenaire fée ou sorcière qui se cachait en moi ". Lors de la représentation proprement dite, je sais maintenant que j'ai connu alors - la seule fois de ma vie peut-être et en tout cas à ce degré - un jeu parfaitement pur, où il n'y avait rien d'autre que la découverte, sans aucun souci de recherche, de culture, de conquête, de combat, d'art ou de séduction". |